Attention aux interactions ! Ces aliments et médicaments ne vont pas ensemble
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Attention aux interactions ! Ces aliments et médicaments ne vont pas ensemble

Daniela Schuster
17/10/2023
Traduction: Stéphanie Casada

Les médicaments sont censés guérir. Pourtant, nous boycottons souvent leur effet sans le savoir, par le biais de notre alimentation. Dans le pire des cas, cela peut même avoir des conséquences mortelles.

Les médicaments agissent. Cela dit, ils ne le font de manière optimale que dans des conditions optimales. La plupart des gens savent que différents médicaments peuvent s’influencer lorsqu’ils sont pris en même temps. C’est aussi écrit sur la notice d’emballage.

Mais certains aliments, boissons et même compléments alimentaires peuvent aussi, s’ils ne sont pas pris à une distance suffisante, modifier l’effet de vos médicaments. Et ce, de manière à ce qu’ils n’aient plus d’effet, qu’ils soient nettement atténués ou au contraire beaucoup trop forts. Cela peut renforcer les effets secondaires désagréables et aussi provoquer des effets indésirables, parfois même dangereux.

La raison : « Chaque repas contient plusieurs centaines de composés chimiques potentiellement interactifs », explique le Dr Günther Schwarz, professeur à l’Académie de l’Association pour des conseils indépendants en matière de santé (en allemand) sur le thème « Médicaments et aliments ». Ainsi, des composants de l’alimentation peuvent lier des substances médicamenteuses actives, retarder leur absorption ou même empêcher cette dernière. De plus, la composition des aliments modifie le transport, la vitesse d’absorption et le métabolisme de la bile et du foie.

Attention au pamplemousse

Dans les années 90, des scientifiques ont découvert par hasard que le pamplemousse influençait l’effet de certains médicaments. Dans le cadre d’une étude, les chercheur·ses avaient donné aux sujets un médicament associé à du jus de pamplemousse. Les pilules avaient ainsi un meilleur goût, mais leurs substances actives n’étaient plus dégradées, leur concentration dans le corps était presque deux fois plus élevée.

Sur la base de cette découverte fortuite, les scientifiques de l’institut canadien Lawson Health Research Institutes ont poursuivi leurs recherches. Sur la liste publiée jusqu’en 2013 figurent 85 médicaments qui ne doivent en aucun cas être pris avec du jus de pamplemousse. Parmi eux, les réducteurs de cholestérol, les analgésiques ou les contraceptifs oraux contenant des œstrogènes.

Le risque : des éruptions cutanées, des vertiges, des maux de tête et des difficultés respiratoires, voire une chute de la tension artérielle, des lésions rénales graves, une destruction musculaire ou encore un arrêt cardiaque soudain. Un avertissement « pamplemousse » apparaît donc désormais sur la notice de nombreux médicaments.

Les notices et les informations d’utilisation sont déficitaires

Malheureusement, les notices d’utilisation ne vous informent que peu sur les autres combinaisons douteuses d’aliments et de médicaments.

  • 1re raison : de nombreuses interactions ne sont tout simplement pas (encore) connues.
  • 2e raison : même si des informations sont données sur les notices d’emballage, les avertissements sont souvent incompréhensibles pour les profanes que nous sommes.

C’est ainsi que des incidents ; parfois tragiques ; se produisent régulièrement. Le Demenz Journal bernois a par exemple rapporté l’histoire d’un septuagénaire qui, privé d’appétit après une pneumonie, a essayé de reprendre des forces en buvant beaucoup de jus de canneberge. Il est mort six semaines plus tard. Une étude résume la cause probable du décès : l’enzyme qui dégrade le médicament warfarine avait été inhibée. Les flavonoïdes (substances végétales secondaires) contenus dans la boisson aux fruits, en principe saine, avaient augmenté l’effet de l’anticoagulant que l’homme prenait depuis des années, ce qui a provoqué des hémorragies internes mortelles.

Même sur la « Gelbe Liste Pharmaindex », un répertoire de médicaments pour l’Allemagne qui contient plus de 27 000 préparations avec toutes les informations importantes sur les domaines d’application, les contre-indications ou encore les interactions, il manque toujours une référence aux cranberries pour la warfarine. Seule la consommation de grandes quantités d’airelles fait l’objet d’une mise en garde.

Interactions : de l’alcool à la vitamine K

Bien entendu, l’interaction entre les aliments, les boissons et les médicaments n’est pas toujours aussi dramatique. Néanmoins, il est important de surveiller votre alimentation lorsque vous prenez des médicaments. J’ai résumé les interactions aliments-médicaments les plus fréquentes, outre le pamplemousse, sur la base de la « liste jaune » :

Alcool : sous médicaments, il faudrait renoncer à la bière et autres. L’alcool atténue en outre le système nerveux central et renforce ainsi l’effet des antidépresseurs, des somnifères et des tranquillisants, par exemple. De plus, de grandes quantités d’alcool empêchent votre corps de décomposer et d’éliminer les médicaments. Leur effet est potentialisé. Cela peut s’avérer dangereux, et pas seulement sur la route, car la capacité de concentration et de réaction en pâtit. L’alcool renforce par exemple aussi l’effet des médicaments contre le diabète ou des anticoagulants.

Fibres alimentaires : en fait, les fibres alimentaires des légumes, des fruits et des céréales complètes peuvent lier certains médicaments et, en raison de leur propriété, inhiber leur absorption. Leur effet est donc atténué. C’est le cas par exemple de l’acide acétyl-salicylique (AAS), de la lévothyroxine (L-thyroxine) pour le traitement de l’hypothyroïdie, de la digoxine en cas de faiblesse du muscle cardiaque et de troubles du rythme cardiaque ou de certains types de pénicilline. Vous ne devriez donc pas prendre vos comprimés avec des céréales ou des produits laitiers.

Calcium & produits laitiers : le calcium peut réduire l’absorption des substances médicamenteuses. En cas d’absorption simultanée de calcium, les médicaments contre la carence en fer, la perte osseuse, les infections et les maladies de la thyroïde, par exemple, ne déploient pas pleinement leurs effets. Si vous prenez de tels médicaments, vous ne devez pas manger de produits laitiers deux heures avant et après la prise. Mieux vaut également éviter l’eau minérale enrichie en calcium (et / ou en fer).

Caféine : de nombreux médicaments ou contraceptifs oraux perturbent le métabolisme de la caféine et entraînent une augmentation du taux de caféine dans le sang. Les conséquences vont des nuits blanches et de la nervosité aux troubles du rythme cardiaque en passant par un besoin accru d’uriner. La caféine inhibe également le métabolisme de la théophylline, utilisée dans le traitement de l’asthme bronchique ou de la bronchite chronique. Si vous prenez des comprimés de fer, il faudrait également éviter la caféine. En effet, les tanins du café ou du thé s’agglutinent dans l’estomac avec le fer pour former des composés insolubles qui ne sont alors plus absorbés par le corps. De même, certains médicaments contre les maladies psychiques, appelés neuroleptiques, agissent moins bien en combinaison avec le thé noir.

Protéines & aliments riches en protéines : les protéines sont constituées de nombreux petits éléments, les acides aminés. Votre corps produit également de telles amines. Si vous prenez maintenant des médicaments qui interviennent (ou sont censés intervenir) dans le cycle métabolique de ces amines endogènes, ceux-ci interagissent également avec les amines présentes dans les aliments riches en protéines comme la viande, le poisson, les produits laitiers, les œufs ou les légumineuses. L’efficacité du médicament est compromise. Le fromage et autres peuvent donc poser problème si vous les mélangez par exemple avec des médicaments contre la dépression ou la tuberculose.

Les aliments riches en graisses : un repas très riche en graisses peut avoir différents effets en cas de prise simultanée de médicaments. D’une part, la graisse se dépose comme un film sur la muqueuse intestinale et ralentit ou diminue l’absorption du médicament. Mais il y a aussi le contraire, à savoir que les médicaments présentent une absorption significativement accrue si vous les avalez avec des aliments gras. Et les substances actives liposolubles sont également mieux absorbées.

Jus de fruits, boissons acides et vitamine C : l’absorption gastro-intestinale des médicaments contenant des amphétamines, telles que les coupe-faim ou les médicaments contre le TDAH, est modifiée lorsqu’ils sont pris avec des aliments et des boissons acides tels que les sodas, le champagne et le vin, les jus de fruits ou la vitamine C. Les médicaments contenant des amphétamines ne sont pas absorbés par l’organisme. En outre, le taux de fexofénadine est réduit en cas de prise avec des jus de fruits. Votre antihistaminique pour le rhume des foins ne sera plus aussi efficace.

La réglisse : la friandise ne doit pas être combinée, surtout par les patient·es souffrant d’hypertension ou d’autres maladies cardio-vasculaires, les diabétiques et les femmes enceintes, avec des produits qui déshydratent l’organisme, appelés diurétiques. En effet, la réglisse peut faire en sorte que vous éliminiez trop de potassium, mais que vous reteniez l’eau et le sodium dans votre corps. Les conséquences vont alors des œdèmes (rétention d’eau dans les tissus) à une faiblesse musculaire due au potassium, voire à des troubles du rythme cardiaque, en passant par une augmentation de la pression artérielle.

Les aliments contenant de la tyramine : la tyramine se trouve par exemple dans les aliments riches en protéines et conservés longtemps, comme certains fromages, le salami, les haricots blancs, la levure, les fèves de soja, certaines bières et le vin rouge, en particulier le Chianti. Normalement, le corps se protège lui-même contre un taux élevé de tyramine. Mais si vous prenez certains médicaments contre la dépression, appelés inhibiteurs non sélectifs de la MAO, ils bloquent la dégradation. C’est pourquoi vous devez éviter tous les aliments qui contiennent de la tyramine. Sinon, votre tension artérielle peut augmenter dangereusement et même provoquer une hémorragie cérébrale mortelle. Les inhibiteurs de la MAO ne sont d’ailleurs pas non plus compatibles avec l’histamine, qui se trouve par exemple dans le maquereau ou le cheddar.

Vitamine K : la vitamine K atténue l’effet des médicaments anticoagulants destinés à prévenir les thromboses. On la trouve en grande quantité dans le chou-fleur ou le chou vert, le brocoli, l’avocat, les épinards, les petits pois, les haricots (de soja) ou encore le thé noir et le foie.

Boire de l’eau, faire ceinture et s’auto-observer

Bref, et maintenant ? Sauf avis contraire sur la notice d’emballage, de votre médecin ou de votre pharmacien, il est préférable d’avaler votre médicament avec de l’eau du robinet ou de l’eau minérale pauvre en calcium et, le cas échéant, de renoncer aux aliments et aux boissons mentionnés ci-dessus.

Mais comme la liste ci-dessus comprend aussi des aliments sains ou des plats que vous appréciez tout particulièrement, vous devriez dans tous les cas parler de vos habitudes alimentaires et de vos habitudes de consommation avec votre médecin. Iel peut alors trouver un moyen d’équilibrer vos médicaments et votre alimentation.

Besoin de recherche et de documentation

Jusqu’à présent, il n’existe pas vraiment d’aperçu scientifique complet de la fréquence des interactions aliments-médicaments et de leurs conséquences. De nombreuses interactions ne sont tout simplement pas encore connues ou documentées. « Nous partons du principe que seuls 20 pour cent au maximum des cas réels sont rapportés », explique Maik Pommer, porte-parole de l’institut allemand Institut allemand pour les dispositifs médicaux et les produits pharmaceutiques (BfArM).

Ce dernier encourage tous·tes celles et ceux qui soupçonnent une interaction avec un médicament à faire part de leur expérience, à Meldestelle des BfArM ou à Swissmedic pour la Suisse. « Si davantage de personnes se manifestaient, il serait possible de bien mieux cerner le problème, et de mettre en garde en conséquence sur les emballages ou les notices. »

Photo d’en-tête : shutterstock

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Daniela Schuster
Autorin von customize mediahouse

Si mon travail n'existait pas, je l'inventerais. Écrire, c'est se donner la possibilité de mener plusieurs vies en parallèle. Aujourd'hui, je suis dans un laboratoire avec une scientifique, demain je partirai en expédition au pôle Sud avec un explorateur. Chaque jour, je découvre le monde, j'apprends de nouvelles choses et je rencontre des gens passionnants. Mais ne soyez pas jaloux·se : la lecture a le même effet !

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