En coulisse

Femme, la trentaine ; que faire ?

Alerte, crise existentielle : trente bougies brûlent sur le gâteau et je n'ai qu'un seul souhait : savoir ce que j'attends de la vie. Mais pourquoi les choses me semblent-elles soudain plus compliquées à 30 ans ? Un entretien avec l'experte sur le dilemme quand tout peut, mais rien ne doit être fait.

Trente ans ; je me situe quelque part entre « tu es jeune, tu as encore toute la vie devant toi » et « Alors, quand vas-tu te marier et avoir des enfants ? L'horloge tourne. » Et comment... je ne vous le fais pas dire. Avec les voix et les questions dans et autour de ma tête, le métronome ajoute au bruit de fond discordant rappelant une répétition d'orchestre ratée. Aucune trace du chef d'orchestre. En revanche, la flûte à bec joue la mauvaise note et quelque part au fond de la salle, les baguettes de batterie tombent par terre. Tout le monde a perdu le sens du rythme. Et moi ? Je suis à la recherche d'une mélodie.

Tout comme beaucoup de femmes à la trentaine, m'assure Dania Schiftan. Dans son activité de psychothérapeute, elle accompagne les femmes dans leur recherche de réponses aux grandes questions de la vie.

Dania, j'ai eu trente ans il y a quelques jours. Mes sentiments et mes pensées emmêlent. Je me pose des questions d'avenir qui semblaient hors de propos pendant des années et soudain, les réponses ne me parviennent pas assez vite : qu'est-ce qui m'arrive ?
Dania Schiftan : tu es à un âge où tu as probablement déjà eu l'occasion de vivre de nombreuses étapes importantes de ta vie : une forme d'études, quelques années dans la même entreprise, ta première relation, ton propre appartement, etc. À cela s'ajoute un environnement qui évolue, par exemple lorsque deux amies sur trois se marient ou attendent un enfant. Tu te poses alors toutes sortes de questions que tu ne t'étais jamais posées auparavant. Et l'une d'entre elles est la suivante : que faire maintenant que j'ai 30 ans ?

Exactement, que faire ?
Ce qui est compliqué dans cette situation, c'est que, théoriquement, toutes les options te sont ouvertes, mais qu'en même temps, beaucoup de choses sont déjà, dans une certaine mesure, prédéfinies. Par exemple, par ta formation. La plupart des personnes profitent de leur niveau de vie durant cette phase et ne souhaitent donc pas nécessairement entamer de nouvelles études ou un nouvel apprentissage simplement parce qu'elles ont envie de quelque chose de nouveau. Dans ce cas, on se demanderait plutôt : qu'est-ce que je veux et que faire avec ce que j'ai ?

Que la planification de la carrière et de la famille soit une préoccupation, cela me semble évident. Y a-t-il d'autres sujets dont les femmes aux alentours de la trentaine souhaitent plus souvent aborder avec toi en psychothérapie ?
Chaque femme a bien sûr un passé et une évolution différents. Mais les défis auxquels mes patientes sont souvent confrontées concernent le sens de la vie, leur attractivité et leur corps qui se transforme. Les amitiés qui souffrent du manque de temps et les adaptations dans l'organisation des loisirs en raison d'un partenariat sont également des thèmes abordés. Il en va de même pour la planification financière. Les femmes ont une conscience financière propre et indépendante, différente de celle de nos mères ou de nos grands-mères, car elle n'est pas liée à leur partenaire. Mais dans le contexte du planning familial, certains rentrent dans des schémas traditionnels et se retrouvent à nouveau dans une relation de dépendance avec leur partenaire qui leur pose problème.

Comment gérer au mieux de tels facteurs de stress et le désordre intérieur ?
À ce stade de leur vie, les gens sont souvent insatisfaits ou incertains et pensent que quelque chose ne va pas chez eux. Pourtant, ce processus est tout à fait naturel. Le mieux est de s'écouter et de noter les questions que l'on se pose. Ensuite, on peut commencer à les classer en deux catégories : d'un côté les « vraies » questions, c'est-à-dire celles qui sont vraiment pertinentes pour soi et de l'autre les questions qui surgissent pour des raisons sociales, parce qu'« on arrive à cet âge » où l'on devrait prendre telle ou telle décision.

Par exemple, se marier et avoir des enfants ?
Exactement. Les femmes qui ont la trentaine sont confrontées à la baisse de leur fertilité. On attend souvent d'elles qu'elles se positionnent et sachent où elles en sont.

Je dois avouer que cela me fait un peu peur de savoir que je ne possède qu'un nombre limité d'ovules, alors que les hommes peuvent encore produire des spermatozoïdes jusqu'à un âge avancé...
La question de la famille est définitivement l'un des points les plus difficiles. Surtout si tu n'es pas sûre de ton avenir et que tu ne sais pas si tu veux devenir mère ou non. En revanche, si tu as une idée claire de ce que tu veux, tu vivras souvent plus facilement la phase de la trentaine. À cela s'ajoute le fait que, socialement parlant, il est toujours plus difficile pour les femmes de se sentir ainsi.

Personnellement, sur ce sujet, j'ai beaucoup de mal à faire abstraction des voix qui m'entourent. Du coup, j'ai l'impression de ne plus entendre la mienne.
Cela est dû au fait que nous nous mesurons aux gens qui nous entourent : selon quelles normes et valeurs vivent-ils ? Jusqu'à un certain point, c'est tout à fait normal, car nous vivons dans une communauté et nous voulons en faire partie. Mais si tu n'es pas encore sûr de toi, cela peut exercer une pression et te déstabiliser. Tout comme les amies qui ont déjà trouvé leurs réponses et savent exactement ce qu'elles veulent. On se demande alors : qu'est-ce qui ne va pas chez moi, pourquoi est-ce différent chez moi ?

Est-ce que cela signifie que mes amies ne sont pas des interlocutrices idéales pour ce genre de thèmes ?
Tout dépend de comment vous communiquez. Si tes amies peuvent s'engager dans une telle conversation sans porter de jugement, si elles s'intéressent à toi et si elles t'aident à entendre ta voix, rien ne s'y oppose. Si, au contraire, tes amies ont tendance à protéger leurs décisions ou à les défendre avec des arguments, il est plus utile d'obtenir le soutien professionnel de quelqu'un qui a une attitude ouverte et qui te guide dans ton processus de décision.

Comment procéder lors du processus de décision ?
Il ne va pas de soi qu'une femme veuille des enfants ou puisse en avoir. La première étape consiste donc à admettre que tu n'es pas encore sûr de toi. Pour parvenir à une décision, les femmes doivent se donner et prendre le temps. Souvent, il est utile de se fixer des dates dans son agenda auxquelles on se penchera activement sur la question. J'ai aussi des patientes qui se font congeler leurs ovocytes pour gagner du temps. Certaines le font aussi parce qu'il est tout simplement trop tôt pour elles de penser à la planification familiale, sachant que la question se réglera d'elle-même dans les cinq prochaines années.

Et si la question ne se résout pas facilement ?
En pensant ainsi, les femmes se mettent tellement sous pression. Beaucoup ont tellement peur de ne plus être assez fertiles dans quelques années qu'elles ne peuvent pas profiter correctement le temps qu'il leur reste. Une personne qui pense constamment à devoir prendre bientôt une décision se bloque elle-même.

Certains argumenteraient que l'indécision est aussi une décision qui va dans le sens de ne pas avoir d'enfants.
Ce n’est pas aussi simple que ça. La réponse à cette question varie d'une personne à l'autre. Il y a différentes parties en nous. L'une, par exemple, est encore une enfant, l'autre est blessée, etc. La plupart d'entre nous portent en eux une petite armée de ces fragments. Et ces parties ont des besoins différents et travaillent donc souvent les unes contre les autres. La partie adulte, sûre d'elle, trouve par exemple les enfants super, tandis que la partie enfantine se sent encore trop délaissée et dans le besoin et ne peut absolument pas s'imaginer, dans sa détresse, s'occuper d'un enfant.

Cela me paraît logique.
Si les sentiments concernant le désir d'avoir un enfant ou non sont si peu clairs et diffus, on pourrait donner suffisamment d'espace à ces différentes parties dans le cadre d'une thérapie et les confronter, les écouter. Ainsi, nous découvrons quelles parties de la patiente ont besoin d'attention pour être guéries. Ainsi, il se peut qu'une personne au départ indécise puisse se décider clairement pour ou contre les enfants après une thérapie.

Dania Shiftan travaille depuis 14 ans comme sexologue et psychothérapeute dans son cabinet à Zurich. Elle travaille également en tant que psychologue pour Parship. Vous trouverez plus d'informations sur elle et son travail dans l'interview que j'ai menée avec elle :

Photo d'en-tête : Roman Odintsov via Pexels

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En tant que fan de Disney je vois toujours la vie en rose, je vénère les séries des années 90 et les sirènes font partie de ma religion. Quand je ne danse pas sous une pluie de paillettes, on me trouve à des soirées pyjama ou devant ma coiffeuse. PS Le lard est un de mes aliments favoris. 

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