Fujifilm GFX 100 II
102 Mpx, Format moyen
Le nouvel appareil photo moyen format de Fujifilm est le modèle le plus avancé de sa catégorie. Il a la même résolution de 100 mégapixels que son prédécesseur, mais d’autres éléments ont été nettement améliorés.
Les appareils photo moyen format ont longtemps été considérés comme de vieilles Ferrari : ils sont beaux et performants, mais aussi hors de prix, sujets aux problèmes et dépourvus de systèmes d’assistance. En clair, des appareils impressionnants pour les professionnels, des jouets de luxe pour les amateurs.
Il y a quatre ans, Fujifilm présentait l’équivalent d’une Audi moderne : au prix de lancement de 12 000 francs suisses, le GFX 100 n’était pas donné, mais c’était une véritable aubaine par rapport aux modèles de Hasselblad et Phase One offrant une qualité d’image similaire. Et contrairement à ses concurrents puristes, le GFX 100 est arrivé avec des atouts modernes : autofocus à détection de phase doté d’une fonction de détection des visages, stabilisateur d’image et fonctions vidéo. Cet appareil a donc été l’instigateur d’une petite révolution.
Fujifilm vient de présenter son successeur, le GFX 100 II. Ce n’est plus une révolution, mais une évolution. Avec son nouveau facteur de forme sans poignée verticale fixe, cet appareil s’adresse cette fois-ci à un public plus large. Son prix de 7600 francs le rend aussi plus accessible. Ce sont 4400 francs suisses de moins que le GFX 100 lors de son lancement, et moins que le Hasselblad X2D actuel.
Le fabricant japonais a aussi présenté trois nouveaux objectifs dans la foulée : le Fujinon GF 55mm f/1.7 WR est une longueur focale normale à forte intensité lumineuse. Ses premiers objectifs à bascule et décentrement (tilt/shift), le Fujinon GF 30mm f/5.6 T/S et le Fujinon GF 110mm f/5.6 T/S Macro, sont bien plus intéressants. Ils devraient rendre le système GFX très attrayant pour la photographie de bâtiments et de produits.
Fujifilm m’a fourni un exemplaire du GFX 100 II et du Fujinon GF 55mm f/1.7 WR avant leur sortie. Le matériel avait déjà sa version finale, pas le firmware. Notez que le fabricant pourrait encore améliorer quelques détails avant qu’il ne livre ses appareils.
Le Fujifilm GFX 100 II ressemble à un outil. Son design s’harmonise bien aux studios photo, entre les flashs et les lampes à trépied. Le boîtier est fait d’un alliage de magnésium protégé par du plastique. Pourvu des objectifs nécessaires, le système moyen format reste plus encombrant qu’un plein format, même si le corps en lui-même n’est pas beaucoup plus volumineux.
Le GFX 100 II est recouvert d’un caoutchouc texturé à l’avant et sur le côté, pour une meilleure prise que le matériau plus lisse de son prédécesseur. La poignée est grande et reste confortable dans ma main de taille moyenne, même après plusieurs heures. Selon les indications de Fujifilm, l’appareil résiste aux intempéries. Je le crois, quand je vois les finitions soignées de son modèle, malgré l’absence de certification IP officielle.
La poignée verticale ne me manque pas. L’appareil est plus compact et pèse presque 400 g de moins. Il n’est quand même pas aussi léger que le GFX 100S, qui pèse encore une centaine de grammes de moins.
Voici les principales spécifications du GFX 100 II :
Le boîtier abrite à nouveau un capteur CMOS rétro-éclairé de 43,8 × 32,9 millimètres. C’est une version remaniée de son prédécesseur, dont la résolution est la même (100 mégapixels). La plage dynamique devrait être plus vaste, car les photodiodes et les fils de cuivre sont de meilleure qualité.
La vitesse de prise de vue en rafale est frappante pour un appareil doté d’un capteur aussi grand. Elle atteint jusqu’à huit images par seconde, soit trois de plus que l’ancien modèle ! Malheureusement, la vitesse de synchronisation du flash n’a pas changé (1/125 de seconde). Ce sera sans doute un gros inconvénient si vous souhaitez allier le flash à un éclairage intense. La plupart des appareils photo plein format peuvent atteindre 1/250 de seconde. Ce retard est bien plus grand par rapport au Hasselblad X2D qui, avec l’obturateur central, peut synchroniser jusqu’à des vitesses d’obturation de 1/4000 de seconde.
Le GFX 100 II a plein de boutons. Par exemple, il en a trois au-dessus du déclencheur, et deux à l’avant, à côté de la poignée. Plusieurs ne sont pas étiquetés. Je peux leur attribuer moi-même une fonction, et les possibilités de réglage dans les menus sont très précises. Est-ce que je veux régler la luminosité du viseur manuellement, ou laisser faire l’appareil ? Et si j’optais pour le réglage automatique, « +2 » par exemple, c’est-à-dire toujours un peu plus clair que ne le suggère l’appareil ? Plein d’autres options s’offrent à moi.
Cette personnalisation rend l’utilisation du nouveau GFX complexe au début. Il m’a fallu un temps d’adaptation. Je dois attribuer les cadrans et les boutons aux fonctions souhaitées, et bien configurer mon appareil. L’avantage, c’est que je peux ensuite manier mon appareil comme bon me semble.
La partie supérieure du boîtier est dotée d’un énorme écran qui affiche les principaux paramètres de prise de vue en noir et blanc, même lorsque l’appareil est éteint. Pendant la prise de vue, je peux par contre choisir d’afficher un histogramme en direct. Comme l’écran est passablement incliné vers l’arrière, je peux aussi y jeter un coup d’œil pendant que je prends mes photos, sans avoir à poser l’appareil.
Tous les boutons ont des points de pression clairs. La résistance du joystick est plus importante que celle de son prédécesseur. En revanche, il me semble plus précis. La seule chose qui m’agace, c’est que lorsque j’appuie sur le joystick pour sélectionner quelque chose, il a tendance à basculer en même temps. Lorsque ça se produit, il me sort de ma sélection. Ce serait moins problématique si le bouton de confirmation se trouvait directement sous le joystick, mais ce n’est pas le cas, car il se trouve un peu plus bas.
D’après Fujifilm, le stabilisateur d’image intégré au boîtier (IBIS) sur cinq axes permet d’obtenir des temps de pose huit fois plus longs. Par comparaison, ils n’étaient que 5,5 fois plus longs chez son prédécesseur. Je n’ai malheureusement pas pu reproduire cette différence durant mon test. Sur le GFX 100 et le GFX 100 II, j’arrive à obtenir des temps de pose de 1/4 de seconde à main levée, avec un objectif de 55 mm. À 1/2 seconde, les photos deviennent floues sur les deux appareils. Il est possible que le firmware final apporte encore une amélioration.
Je comprends mieux le bond en avant qu’a fait le viseur électronique (EVF), doté d’une résolution de plus de 9,44 millions de pixels (3,1 mégapixels). C’est une amélioration visible par rapport aux 5,76 millions du GFX 100. Le grossissement passe de 0,85 à 1,0 fois. Contrairement au GFX 100S bon marché, le viseur du produit phare peut toujours être remplacé de manière modulaire ou être équipé de l’adaptateur d’angle en option.
Dans l’ensemble, le viseur du GFX 100 II est l’un des meilleurs sur le marché. Je peux redimensionner l’image par paliers. Même si la résolution diminue, c’est génial pour les personnes qui portent des lunettes (comme moi) et ne peuvent pas approcher l’œil très près du viseur. Résultat, les coins de nombreux viseurs me restent inaccessibles.
Rien n’a changé en ce qui concerne l’écran arrière de 3,2 pouces. Aucune amélioration n’était nécessaire, puisque la résolution de 2,36 millions de pixels et la luminosité conviennent parfaitement. L’écran est certes inclinable sur deux côtés, mais je ne peux pas le déplier. C’est dommage, mais pas très grave sur un appareil qui n’a pas été conçu pour le vlogging.
L’autofocus a toujours été la grande faiblesse du moyen format. Le GFX 100 II change la donne ! Personne ne l’utilisera pour prendre des photos pendant les JO, il est trop lent pour ça, mais pour la photographie de portrait, Fujifilm a franchi une étape. Le GFX 100 II est le premier appareil photo moyen format à disposer d’un autofocus que je qualifierais de sophistiqué et qui peut être utilisé dans la vie de tous les jours, même pour capturer des sujets en mouvement.
Par rapport au modèle précédent, j’ai aussi remarqué son meilleur suivi oculaire. Le GFX 100 II définit des zones de mise au point plus petites ; elles se placent plus précisément sur les yeux, et sur les bords de l’image. Je fais quelques portraits, histoire de m’en faire une meilleure idée. Dans notre cave sombre, j’éclaire mon collègue Philipp Rüegg avec un flash de studio. J’éteins les autres lumières et la lumière de mise au point du flash. Je peux tout de même laisser la mise au point en mode automatique sans jamais être déçu. Je n’ai pas à effacer tout un tas de photos floues.
Seul le contre-jour créé par une fenêtre désoriente parfois le suivi oculaire, qui cible la chaise rose au lieu de l’œil de ma collègue Michelle Brändle. Je passe à une zone de mise au point automatique unique, que je place à peu près sur le visage, et le problème est réglé. Chaque image retrouve sa netteté, même à une grande ouverture. C’est super impressionnant, et très utile ! Je peux vraiment me concentrer sur la lumière, la composition de mon image, et mon sujet.
Je n’ai pas essayé les modes de suivi pour photographier les animaux, les voitures, et autres. Je n’aime pas trop utiliser les modes automatiques quand je photographie des objets génériques, car l’appareil ne devine jamais vraiment ce que je veux. Je ne pourrais pas vous le prouver par A + B, mais mon système de référence Sony me semble plus intelligent. Je préfère passer à un champ de mise au point manuel sur le GFX 100 II lorsque je ne fais autre chose que des portraits.
Là aussi, les appareils photo plein format sont plus rapides et plus précis, alors que l’autofocus de Fujifilm cherche parfois un peu avant de se placer. Il n’est pas parfait, surtout en mode continu. Au moins, le GFX 100 II a un autofocus, ce qui n’est pas le cas des produits de Hasselblad. Et il est possible que Fujifilm améliore encore certains aspects de l’autofocus avec son firmware final.
Le capteur du GFX II est tout simplement hallucinant ! Il est exceptionnel à tous points de vue ! Oui, je m’emballe un peu... Lors du développement de l’image, les fichiers donnent l’impression d’avoir plus de profondeur que ceux des appareils photo plein format. Je ne dis pas n’importe quoi, je vous assure, et je peux même vous l’expliquer :
Fujifilm mentionne 30 % de plage dynamique en plus par rapport au GFX 100, mais j’ai quelques doutes. D’après moi, la gamme dynamique se mesure en valeurs de diaphragme. Chaque niveau représente alors un doublement. Le portail Photons to Photos (en anglais) mesure bien 12,2 niveaux sur le premier GFX 100, ce qui est une valeur record. D’après ce que je comprends, une augmentation de 30 % correspondrait à environ 12,5 niveaux. Malheureusement, je n’ai aucune méthode de mesure pour prouver ça.
Je me suis photographié à contre-jour devant un mur éclairé par une lumière vive pour faire un test rapide. J’ai constaté que le GFX 100 II m’offre réellement quelques détails en plus dans les zones sombres et lumineuses que son prédécesseur, au milieu du cercle de lumière, et sur le visage, par exemple. Les couleurs des ombres sont aussi mieux conservées.
Mis à part cela, je ne vois pas de différence entre le nouveau capteur et son « ancienne » version, intégrée au GFX 100 et au GFX 100S. Peu importe, ces appareils fournissaient déjà une qualité d’image exceptionnelle. En avez-vous vraiment besoin au quotidien ? Tout dépend de ce que vous en faites. Une chose est sûre, c’est sympathique de travailler avec des fichiers RAW. Par contre, il vous faut une puissance de calcul suffisante pour le traitement de l’image et suffisamment d’espace de stockage, puisqu’une image non compressée pèse plus de 200 mégaoctets.
Filmer en moyen format n’est pas idéal. Les capteurs sont grands, et leur vitesse de lecture est limitée. C’est la raison pour laquelle l’ancien GFX 100 n’offrait que de la vidéo 4K malgré la haute résolution de ces images, et ce avec une combinaison de Line Skipping et Pixel Binning. La qualité vidéo était bonne, mais pas meilleure que celle d’un appareil photo plein format moyen. Et ce modèle avait un autofocus plus rapide.
Qu’en est-il du GFX 100 II ? Il peut filmer en 8K, jusqu’à 30 FPS en 10 bits 4:2:2. La qualité d’image à cette résolution est comparable à celle des autres caméras 8K. Le profil couleur plat F-Log2 de Fujifilm capture une large gamme dynamique. Je peux convertir les enregistrements avec des LUT en Rec.709 ou en Eternea. En Eternea, la peau prend une teinte chaude qui me plaît bien.
Par contre, en 8K, le GFX 100 II ne prend pas l’image avec le capteur complet. Un crop de 1,51x est nécessaire. En plus, l’appareil photo a besoin de 32 millisecondes pour lire les images. Les capteurs BSI en plein format avec une densité de pixels comparable sont tout aussi lents. 32 millisecondes, c’est un effet de rolling shutter intense. Avec la 4K à 30 et 60 FPS, la vitesse de lecture est plus élevée, et il n’y a plus de crop. Par contre, ces modes donnent des images moins détaillées.
L’autofocus du Fujifilm GFX 100 II convient moins aux vidéos qu’aux photos. Il trouve mon œil dans mes photos de test, et il est assez précis, mais quand je bouge, l’appareil photo déplace la mise au point de manière assez saccadée. Il dépasse souvent la cible et doit se stabiliser un moment. C’est impardonnable pour les enregistrements vidéo professionnels, puisque la mise au point doit être bonne du premier coup, et les déplacements fluides. Les modèles plein format sont bien plus adaptés dans ces cas-là.
Si vous voulez surtout filmer des vidéos, vous trouverez de meilleurs appareils que le GFX 100 II. Par contre, il convient bien pour les projets mixtes, comme faire des portraits et filmer une interview.
Le GFX 100 II est un appareil photo génial pour faire des portraits et photographier des bâtiments et des produits. Vous pouvez aussi l’utiliser pour les reportages et les paysages, selon vos exigences. Les images de 100 mégapixels contiennent des détails très précis, une grande plage dynamique et une grande profondeur de couleur. Les fichiers offrent plus de liberté dans le développement de l’image que ceux des appareils traditionnels. En ce qui concerne les photos, les progrès sont minimes par rapport à l’ancienne version du capteur. En revanche, Fujifilm a nettement amélioré la qualité vidéo. Seul le rolling shutter reste limité en 8K.
Par rapport à son prédécesseur, cet appareil est plus facile à manier, tout en restant sophistiqué. Sa complexité demande un temps d’adaptation, certes, mais ça le rend très paramétrable. La bonne ergonomie, le gigantesque écran haut de gamme et le viseur électronique haute résolution sont également très appréciés.
La plus grande caractéristique unique du GFX 100 II reste l’autofocus. Certes, il ne fait pas la mise au point aussi rapidement et avec autant de précision que les appareils photo plein format actuels, mais c’est le premier modèle moyen format doté d’un système de suivi oculaire auquel je fais confiance. Il me libère l’esprit lorsque je fais des portraits et atteint seulement ses limites lorsque mes sujets font des mouvements rapides. C’est d’ailleurs aussi le cas pour les vidéos, puisque le suivi de la mise au point ne semble pas très fluide.
Avant de nous quitter, regardons du côté des solutions alternatives : le GFX 100S de Fujifilm est moins cher et prend d’excellentes photos. Par contre, il est moins performant en ce qui concerne l’autofocus, le maniement, le viseur électronique et la vidéo. Et le Hasselblad X2D ? C’est un tout autre concept. Son système est plus cher et plus restreint. On attend toujours le suivi oculaire promis par le fabricant suédois, même un an après sa sortie. En revanche, le X2D est équipé d’un obturateur central, il est plus compact et plus classe. C’est un instrument d’exception. Par comparaison, le GFX 100 II est l’outil par excellence.
Mon empreinte digitale change régulièrement au point que mon MacBook ne la reconnaît plus. Pourquoi ? Lorsque je ne suis pas assis devant un écran ou en train de prendre des photos, je suis probablement accroché du bout des doigts au beau milieu d'une paroi rocheuse.