Le premier jour d’école est enfin là, mais maman n'est pas encore prête
Point de vue

Le premier jour d’école est enfin là, mais maman n'est pas encore prête

Katja Fischer
12/8/2022
Traduction: Anne Chapuis

De l'anticipation, de l'incertitude, beaucoup de questions. Voilà ce que je ressens à l'occasion de la rentrée scolaire de mon enfant. Et ce qui passe, ou non, par la tête de ma fille qui commence l'école. Une conversation entre une mère et sa fille.

Dans une semaine, mon premier enfant entrera à l'école. Vous pensez certainement « oh super ». Et en principe, vous avez tout à fait raison. Après tout, c’est le destin de chaque enfant suisse âgé de plus ou moins six ans.

L'histoire pourrait donc déjà s'arrêter là. Une nouvelle étape de vie, un nouveau défi familial ; tout va bien. Point final.

Ou presque. Ce qui, pour l’humanité, présente un tout petit pas est, pour notre famille, un pas de géant. Du moins pour moi, en tant que mère. Pour que vous puissiez vous faire une idée plus précise de mon état d'esprit actuel : pour mon bébé, que je viens tout juste d'allaiter, de changer et de porter en écharpe, les choses sérieuses commencent ces jours-ci ! Je vous demande un peu plus de compassion, d’accord ? Est-ce que quelqu’un peut arrêter le temps ?

Plus le moment approche, plus la nervosité augmente

Mon mari se moque de ma sentimentalité. Ce n’est pas grave, moi aussi me moque légèrement de moi-même. Ma fille de six ans trouve cela aussi drôle qu'embarrassant. Quoi qu’il en soit, elle n’a qu’une seule envie : grandir. Les derniers jours d'école maternelle étaient tout simplement « ennuyeux ». Et elle a déjà préparé son cartable violet, qui pour le moment semble encore bien trop grand pour elle, avant les vacances d'été. Alors qu'elle attend le jour J avec impatience depuis des semaines, je suis de plus en plus nerveux à mesure que la date butoir approche.

Moi : plus qu'une semaine avant la rentrée. Tu es excitée ?
Elle : non.
Moi : pas du tout ? Moi si. Mais tu te réjouis ?
Elle : oui...
Moi : qu’est-ce qui te réjouis le plus ?
Elle : (haussement d’épaules.) Je ne sais pas.
Moi : allez... qu'est-ce qui te réjouit ? Une matière ? Les enseignantes ? Tes camarades de classe ? Ou les récréations ?
Elle : je ne sais sais pas, vraiment. Maman, je ne sais même pas comment c'est l'école.

Elle a tellement raison. Comment pourrait-elle se réjouir à l'avance de quelque chose qui lui est encore totalement inconnu et qu’elle ne connaît que par ouï-dire ? Moi, en revanche, j'imagine déjà ce qui l’attend.

Ces derniers jours, je me surprends souvent à me remémorer mes propres années d'école. Et je constate avec étonnement qu'il ne me reste aucun souvenir du grand jour, le premier jour d'école. J'ai certes des photos où je pose fièrement devant la maison de mes parents, avec mon cartable en cuir rouge, mais je ne m’en souviens pas. J'ai récemment récupéré ce dernier du grenier de mes parents pour le montrer à ma fille. « C'était ton cartable ? », m'a-t-elle demandé, incrédule. À l'époque, nous ne connaissions pas encore le système ergonomique optimisé Easy Grow ou les patchs pailletés interchangeables.

Mon cartable a plus de 30 ans et, contrairement à moi, son cuir ne montre ni signes de vieillesse ni rides.
Mon cartable a plus de 30 ans et, contrairement à moi, son cuir ne montre ni signes de vieillesse ni rides.

Mille questions, mais pas pour mon enfant

Je garde de bons souvenirs de l'école, la plupart du temps, j'aimais y aller. Surtout à cause des amis et sans doute aussi parce que tout était relativement facile pour moi. Aujourd'hui, trente ans plus tard, je me fais du souci : comment ma fille va-t-elle s'en sortir dans sa nouvelle classe ? Aura-t-elle de bonnes amies comme moi à l’époque ? Que faire si elle est victime de harcèlement ? S'entendra-t-elle avec ses professeur·es ? Nous entendrons-nous aussi avec eux ? Arrivera-t-elle à suivre en classe ? Que faire si elle a régulièrement de mauvaises notes ? Autant de questions qui, pour le moment, ne préoccupent pas le moins du monde ma fille.

Moi : bientôt, tu auras à faire des devoirs tous les jours.
Elle : oui, je sais. Et alors ?
Moi : je n'en avais pas toujours envie à l’époque. Surtout quand je n'aimais pas une matière. Mais il fallait quand même les faires.
Elle : tu aimais bien l’écriture et le sport, non ?
Moi : Oui. Au début, j'aimais aussi les maths, mais avec le temps, plus trop.
Elle : c’est quoi les maths ?
Moi : les calculs.
Elle : je pense que je vais bien aimer les calculs.
Moi : tu en as déjà fait un peu. Je me demande quelles seront les autres matières qui te plairont ?
Elle : le sport ! Et le bricolage.
Moi : oui, nous appelions ça « travail manuel », mais j’aimais moins cette matière, je préférais le travail du bois.
Elle : est-ce que nous aurons aussi des devoirs en bricolage ?
Moi : eu... non, je ne pense pas.

En tant que mère, les devoirs me font le plus peur. Avec tous nos hobbies et notre travail, nous avons déjà une journée bien remplie ; je ne sais pas encore quand nous allons trouver le temps pour les devoirs. Je me console en pensant que c'est le cas de la plupart des gens. De plus, je sais maintenant par expérience qu'en tant que famille, nous nous habituons de toute façon rapidement aux changements, même si ceux-ci sont toujours effrayants au début. Cela me rassure un peu.

L'éternelle rengaine des devoirs

Néanmoins, j'espère secrètement que ma fille fera preuve d'autodiscipline. Qu'elle rentre à la maison et qu'elle fasse d'abord ses devoirs de sa propre initiative, pour pouvoir ensuite aller jouer dehors avec ses ami·es en toute bonne conscience. Rien qu’en écrivant cette phrase, je ris intérieurement de moi-même ; après six ans et demi de vie commune avec notre enfant, je nourris encore des espoirs aussi naïfs.

Dans la réalité, je vais devoir la pousser à faire ses devoirs, car tout le reste lui semblera plus important. Et je m'entends déjà gronder tous les jours : « Tant que tu n'as pas fait tes devoirs, tu ne sors pas ! Point final. » Ce qui déclenchera une crise de colère chez elle, car elle entend déjà les enfants du voisin jouer sur l’aire de jeu devant la porte. Les discussions sont (pré)programmées, mais j'essaie encore de les repousser mentalement. Et pendant ce temps, je m'entraîne à rester dans un état d’esprit positif.

Moi : c'est cool que tu puisses aller à l'école avec autant d'enfants du voisinage. J'ai toujours aimé le chemin de l’école.
Elle : hein, pourquoi ?
Moi : peu importe la météo, nous l'avons parcouru ensemble. Plus tard, à vélo, pour le secondaire. On vit beaucoup de choses ensemble.
Elle : mais tu avais un plus long trajet que moi pour aller à l'école, non ?
Moi : oui c’est vrai. Mais tu verras, le tien te plaira tout autant. Au fait, on pourrait le parcourir ensemble dans les jours qui viennent, non ?
Elle : maman, je le connais déjà.
Moi : oui, mais quand même.
Elle : non, je sais où passer.
Moi : d’accord. Mais nous allons encore faire le chemin entre l’école et la garderie.
Elle : si c’est absolument nécessaire...

Ils deviennent tellement vite autonomes. Et j'entends déjà ma propre mère dire cette même phrase. Enfant, je levais les yeux au ciel, aujourd'hui, je la comprends. Pour nous, parents, avoir des enfants signifie avant tout et toujours : lâcher prise et faire confiance. Le premier jour de crèche, la première nuit chez les grands-parents, le premier jour de jardin d’enfants ; c'est une série sans fin de premières fois où il faut laisser faire l’enfant. S’arrêtera-t-elle avec la remise du diplôme d'enseignement professionnel ?

Maintenant, c’est le premier jour d’école. Mon collègue de la rédaction Martin, qui a des enfants de sept et neuf ans, me décrit comment, à l'époque, il pleurait à chaudes larmes au bord de la salle de classe de son premier-né. Dans ma liste mentale de choses à faire, je rajoute « Penser à prendre des mouchoirs ». Et j'essuie discrètement la première larme du coin de l'œil avec ma main. Dans une semaine, je serai prête à aller à l’école, promis.

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Maman d'Anna et d'Elsa, experte en apéritifs, passionnée de fitness en groupe, aspirante ballerine et amatrice de potins. Souvent multitâche de haut niveau et désireuse de tout avoir, parfois chef en chocolat et héroïne de canapé.


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