Les projets de cette équipe font passer les conducteurs de Tesla pour des démodés
En coulisse

Les projets de cette équipe font passer les conducteurs de Tesla pour des démodés

Martin Jungfer
8/2/2023
Traduction: Alassane Ndiaye

Celui ou celle qui conduit une voiture électrique n’est plus depuis longtemps à l’avant-garde de l’automobile. Les véritables pionniers·ières sont des personnes comme les étudiant·e·s de l’EPF de Zurich, qui construisent une toute nouvelle voiture solaire. En octobre, il devrait partir pour un voyage incroyable.

Dans quelques mois, ce véhicule alimenté uniquement par l’énergie solaire devrait parcourir plus de 3000 kilomètres à travers l’Australie. Le Bridgestone World Solar Challenge (en anglais) se déroule de Darwin, au nord du continent, jusqu’à Adélaïde, tout au sud. Des équipes du monde entier construisent actuellement des véhicules pour la course. Souvent, ils viennent des universités ou sont soutenus par des entreprises. C’est le cas de l’équipe suisse de l’EPF (en anglais), inscrite à la course de 2023 dans la classe Challenger. Dans ce cas, il n’y a qu’une seule personne dans la voiture, alors que dans la Cruiser Class, il y a aussi un passager à bord. Près de 30 jeunes hommes et femmes sont engagé·e·s dans le projet. Les étudiant·e·s en ingénierie font partie d’un projet ciblé qui s’étend sur deux semestres.

Pendant cette période, on les voit plus souvent à l’atelier du Technopark à Zurich-Ouest qu’à l’amphithéâtre ou à la bibliothèque. Pour l’instant, c’est-à-dire début février, la voiture de course n’existe toutefois que sur ordinateur comme modèle CAO 3D. Lukas Hauser, qui occupe le poste de responsable opérationnel au sein de l’équipe, me montre l’état actuel du projet sur l’écran d’un ordinateur portable. L’ordinateur se trouve au milieu d’une pièce austère du Technopark. Dans un coin, il y a quelques boissons, dans l’autre, un peu de matériel. Pour pouvoir me montrer quelque chose de concret, les membres de l’équipe ont laissé sortir un modèle de la voiture de course de l’imprimante 3D avant de me rencontrer. Elle ressemble à un dauphin souriant dans cette étude préliminaire.

Deux modèles de la future voiture de course : l’un issu de l’imprimante 3D, l’autre d’un projet CAO
Deux modèles de la future voiture de course : l’un issu de l’imprimante 3D, l’autre d’un projet CAO
Source : Martin Jungfer

Des règles strictes pour les équipes

L’aérodynamique est un atout important pour la course d’octobre, m’explique Lukas. L’équipe a calculé par simulation informatique que la voiture atteindra une vitesse maximale de plus de 100 km/h. En moyenne, la vitesse sera de 80 km/h. Et ce, grâce à la seule force du soleil. Car la recharge à une borne ne sera pas autorisée. Les règles du World Solar Challenge sont strictes. Toutes les équipes de 24 pays doivent construire leur véhicule selon des instructions précises :

  • il doit mesurer cinq mètres de long au maximum et 2,20 mètres de large au maximum ;
  • quatre mètres carrés au maximum de la surface peuvent être équipés de cellules solaires ;
  • le véhicule doit avoir au moins trois roues ;
  • un conducteur ou une conductrice doit le piloter.

L’équipe a déjà désigné un pilote. Jonas Rudin, l’homme dans la caisse en bois sur la photo ci-dessus, pilotera la voiture solaire pendant une grande partie du parcours. Il a certes déjà terminé ses études et s’occupe de l’assortiment dans la boutique en tant que Portfolio Manager chez Digitec Galaxus. Mais il est qualifié à conduire la voiture solaire, parce qu’il a déjà parcouru des centaines de milliers de kilomètres au volant de voitures lors de road trips. Il devrait se réjouir que ses collègues responsables de la construction au sein de l’équipe aient prévu une suspension : « C’est aussi nécessaire parce qu’en Australie, il y a beaucoup de barrières pour vaches sur les routes », m’explique-t-il.

Les 3000 kilomètres, au cours desquels il alternera avec d’autres coureurs, ne devraient toutefois pas être une partie de plaisir. C’est ce que laisse entendre un mock-up de la future voiture de course. Il se trouve dans la pièce voisine, vissé avec quelques panneaux d’aggloméré OSB. Ici, rien ne ressemble à de la haute technologie, plutôt à une caisse à savon. L’équipe teste ainsi, entre autres, si le pilote s’adapte au châssis. Pour l’essai du siège, Jonas tient un « volant » en carton entre ses mains. Il n’a pas beaucoup de marge de manœuvre maintenant, et il n’en aura pas dans le vrai véhicule. La seule chose importante est qu’il puisse sortir de la voiture dans le temps prescrit de 15 secondes maximum. C’est nécessaire pour des raisons de sécurité, car environ la moitié des équipes ne parviendront pas à franchir la ligne d’arrivée. « Il est déjà arrivé par le passé que la voiture soit simplement renversée par une rafale », explique Jonas. Les batteries peuvent prendre feu, les pneus peuvent se dégonfler, l’électronique peut tomber en panne.

Des cellules solaires à haut rendement d’une entreprise suisse

C’est le genre de questions qui préoccupent les membres de l’équipe. Iels veulent construire une voiture efficace, légère et donc rapide, et sûre. En petits groupes, iels bricolent actuellement le design final et les matériaux pour la coque aérodynamique, et réfléchissent à la manière de garder la cabine de conduite un peu au frais sous le soleil brûlant d’Australie. Et bien sûr, il s’agit des cellules solaires qui doivent fournir l’énergie nécessaire au moteur électrique de la voiture. Les étudiant·e·s sont sur le point de conclure un accord de sponsoring avec un fournisseur. Celui-ci construirait les panneaux solaires pour la voiture de course en tant que version spéciale. Le rendement sera donc nettement supérieur à celui d’une installation solaire sur le toit d’une maison. Bien sûr, les étudiant·e·s veulent aussi utiliser la surface maximale autorisée de quatre mètres carrés pour produire le plus d’énergie possible. Celle-ci va ensuite directement dans la propulsion lorsque la voiture est en mouvement. Ou dans la batterie, afin que la voiture puisse reprendre directement la route le matin, après les pauses prescrites pendant la nuit.

Lukas Hauser (à gauche) discute avec Alexandr Ebnöther d’un détail sur le modèle CAO
Lukas Hauser (à gauche) discute avec Alexandr Ebnöther d’un détail sur le modèle CAO
Source : Martin Jungfer

Le principe du véhicule autoalimenté, que l’on peut voir en application lors du World Solar Challenge organisé tous les deux ans depuis 1987, pourrait même être utilisé prochainement par un constructeur automobile commercial. Sono Motors est le nom de l’entreprise bavaroise dont le modèle Sion est censé avoir jusqu’à 305 kilomètres d’autonomie rien qu’en restant exposé au soleil (en allemand). Il existe également un projet de voiture au design un peu plus sportif (en anglais) aux Pays-Bas.

Qu’est-ce qui vous intéresse ?

Le travail de l’équipe de l’EPF et la création de la voiture de course feront l’objet d’autres articles dans le magazine jusqu’au couronnement, nous l’espérons : le passage de la ligne d’arrivée à Adélaïde le 27 octobre. Vous avez des questions sur le projet ? Un thème vous intéresse-t-il particulièrement ? Faites-le-moi savoir dans les commentaires ci-dessous et je vous expliquerai.

Photo d’en-tête : Martin Jungfer

Cet article plaît à 120 personne(s)


User Avatar
User Avatar

Je suis journaliste depuis 1997. Stationné en Franconie, au bord du lac de Constance, à Obwald, Nidwald et Zurich. Père de famille depuis 2014. Expert en organisation rédactionnelle et motivation. Les thèmes abordés ? La durabilité, les outils de télétravail, les belles choses pour la maison, les jouets créatifs et les articles de sport. 


Ces articles pourraient aussi vous intéresser

Commentaire(s)

Avatar