
Point de vue
Querelle sur les armes-jouets : Rester détendu et montrer sa position
par Michael Restin
Ils répandent les maladies et sèment leurs déjections partout. Pour cela, ils semblent d'ailleurs avoir un attachement particulier pour mon rebord de fenêtre. Mon aversion pour les pigeons n'a pas de limites, mais ne devraient-ils pas m'inspirer plus de peine que de dégoût ?
« Rou-rou, rou-rouuuu. » Chaque matin, les roucoulements à ma fenêtre me réveillent avant même que mon réveil ne sonne. Je n'ai pas le temps de sortir du lit que les pigeons ont déjà ruiné ma matinée. Tels des soldats de plomb, ils roucoulent en rangs serrés sur mon rebord de fenêtre. Dès que je commence à remonter les stores, des battements d'ailes désordonnés se font entendre et le calme revient pour quelques instants. Mais les pigeons ne sont pas des oiseaux ingrats, ils ne partent jamais sans me laisser quelques souvenirs.
Les créatures ailées sont là à longueur de journée, elles n'abandonnent pas leur poste. L'air arrogant, avec une pointe de débilité mal dissimulée, comme seuls les pigeons savent faire, ils se posent devant les fenêtres et en souillent les rebords. Je n'ai pas d'autre choix que de me lever de ma chaise de bureau pour faire fuir ces maudits oiseaux. Mais à peine quelques minutes plus tard, ils sont déjà de retour. Imperturbables. Il faut voir le bon côté des choses, ça me force à me lever et à faire quelques pas dans mes journées de télétravail. Mais ma gratitude a des limites.
Les plumes, le roucoulement et leurs petites têtes vissées sur des corps complètement disproportionnés. Les pigeons des villes ne m'inspirent que dégoût. Ce n'est pas pour rien qu'on les appelle aussi « rats des airs ». Et ils picorent sans arrêt, imperturbables. De vrais barbares. Le rappeur Booba partage d'ailleurs mon dédain du columba livia.
C'est pas que j'aime pas me mélanger mais disons / C'est pas que j'aime pas me mélanger mais disons / C'est pas que j'aime pas me mélanger mais disons / Simplement que les aigles ne volent pas avec les pigeons
Et pourtant je ne pensais pas tant à mal des pigeons jusqu'à récemment. Sûrement, parce que jusqu'à il y a peu, je ne vivais pas en plein cœur de Zurich, mais dans une petite ville. Là-bas, seule une poignée de pigeons se posaient au bord de la fontaine ou occupaient la place pavée. En tant que passante, les roucoulements et les battements d'ailes étaient plutôt agréables. Maintenant, ils sont partout où je vais, occupant le moindre mètre carré sans qu'on les y ait invités. Leur capital sympathie s'est écroulé.
Le pigeon s'en est toujours bien sorti dans l'histoire de l'humanité. Dans les temps anciens, la science considérait même que le pigeon ne possédait pas de vésicule biliaire et était donc exempt de tout mal. La colombe symbolise la paix, l'amour, l'âme et, dans l'église, le Saint-Esprit. Dans la Grèce antique, elle accompagne la déesse de l'amour Aphrodite, puis son homologue romaine Vénus. Est-ce que ce trop-plein d'attention positive a transformé le pigeon en morveux ?
Je penche pour le « oui », mais la réponse n'est pas totalement arrêtée. Le fait est que le pigeon est l'un des premiers animaux à avoir été domestiqué, à l'origine pour sa beauté. Les pigeons sauvages ont été élevés en Orient pour devenir les premiers pigeons domestiques. Le pigeon voyageur est une espèce particulière, utilisée principalement pour la transmission de messages et plus tard, pour des courses aériennes. Et le pigeon de ville dans tout ça ? Il a débarqué dans la rue pour son travail de facteur, c'est en fait une espèce domestiquée revenue à l'état sauvage.
Attendez un instant... Nous serions responsables de l'existence même des pigeons de ville ? Oui, et aussi du fait qu'ils sont encore légion aujourd'hui. Le biologiste Daniel Haag-Wackernagel, qui fait des recherches sur les pigeons à l'Université de Bâle, m'a expliqué dans un e-mail qu'un si grand nombre de pigeons peut survivre grâce à l'abondance de nourriture et de déchet à leur disposition. Dans le monde, on compte en moyenne un pigeon pour dix à vingt citadins. Chacun de ces 300 millions d'oiseaux défèque deux fois par heure, ce qui représente 30 grammes par jour. Les fientes ont un effet corrosif sur les matériaux de construction calcaires et les métaux. En outre, leurs maladies et parasites peuvent être transmis à l'homme.
Si je voulais nettoyer mes rebords de fenêtre, je devrais me munir d'un équipement spécial. Masque de protection, gants et même combinaison jetable : c'est le strict minimum pour ne pas être contaminé par les déjections. Je ne m'attendais pas à des mesures si extrêmes.
Finalement, le Professeur en biologie médicale me montre que je devrais en fait avoir de la pitié pour les pigeons de ville. En effet, leur démographie importante est également un problème pour les pigeons eux-mêmes. L'extrême densité démographique entraîne du stress, ils vivent dans des conditions similaires aux habitants des bidonvilles. Les oisillons agonisent et meurent de maladie. D'ailleurs, les pigeons ne sont sales que lorsqu'ils sont malades. En bonne santé, ils consacrent 15 % de leur temps au nettoyage. Ils ne seraient pas si barbares que je le supposais. La culpabilité commence à m'envahir. Le pigeon serait-il la vraie victime, faisant de moi une pleurnicharde ? Je le crains...
Pour améliorer la situation, il n'y a qu'une seule solution : on doit se débarrasser des ordures qui jonchent nos rues et arrêter de nourrir les pigeons. Ce n'est qu'en réduisant l'offre de nourriture que le nombre de pigeons dans nos villes pourra baisser. Actuellement, leurs prédateurs naturels tels que les faucons pèlerins et les martres ne sont plus en mesure de les suivre. Faites une faveur aux pigeons, mais aussi un peu à moi et à vous-même, et recyclez vos restes. Avec le pain rassis par exemple, vous pouvez faire un délicieux pain perdu (Vogelheu).
En attendant que la population aviaire diminue dans nos villes, je vais tenter de voir ses roucoulements incessants comme des appels à l'aide et pas comme de la pure provocation. J'ai aussi trouvé sur Galaxus une combinaison de protection qui me permettra de nettoyer le résultat de toute cette souffrance enfouie. Les pigeons des rues sont ce qu'ils sont et n'y peuvent rien. Eux aussi, préféreraient sûrement continuer à s'occuper de la distribution du courrier.
Élargir mon horizon: voilà comment je résumerais ma vie en quelques mots. J'aime découvrir de nouvelles choses et en apprendre toujours plus. Je suis constamment à l'affût de nouvelles expériences dans tous les domaines: voyages, lectures, cuisine, cinéma ou encore bricolage.