Critique

« The Flash » : un film « in the Multiverse of Madness »

Au vu des scandales et autres frasques qui ont accompagné la production de The Flash, ce film pourrait très bien être un désastre. Et pourtant, il est super. C’est peut-être même l’un des meilleurs films de l’ancien univers DC !

Avant toute chose : cet article ne contient aucun spoiler. Vous n’apprendrez rien de plus que ce qui a déjà été révélé dans les bandes-annonces déjà diffusées.


Le plus dingue, c’est sans doute que ce film existe, tout simplement. D’une part, le studio est en train de vivre un tournant. Depuis que James Gunn, le réalisateur des Gardiens de la Galaxie, a pris les rênes de DC (l’ennemi juré de Marvel), tout est en train de changer. Il est en train de complètement rebooter la franchise. The Flash est l’un des derniers restants de l’ancien univers cinématographique DC agonisant.

D’autre part, l’acteur principal, Ezra Miller a été arrêté et poursuivi (en anglais) plusieurs fois. Les fans craignaient que le film ne soit tout simplement annulé. Il s’est apaisé depuis ; il suit une psychothérapie.

Je me demande quand même comment un film peut être si bien, quand autant d’obstacles se sont dressés sur sa route. Je n’en sais rien mais, à ma grande surprise, The Flash pourrait même être le meilleur film de l’univers étendu de DC Comics !

Le sujet du film

Barry Allen (Ezra Miller) n’est pas très doué pour concilier ses activités d’expert médico-légal au Central City Police Department et de superhéros. Quand il n’est pas en retard au travail, il aide Batman (Ben Affleck) à mettre les criminels derrière les barreaux. Comme si cela ne suffisait pas, il essaie toujours de prouver l’innocence de son père. En effet, lorsqu’il était enfant, sa mère (Maribel Verdú) a été assassinée par un cambrioleur, et son père (Ron Livingston) a été injustement déclaré coupable de ce meurtre.

Au moment où Barry touche le fond, il découvre qu’il ne peut pas seulement courir vite, mais qu’il peut aussi remonter le temps. Jusqu’au moment du décès de sa mère. Et s’il tentait de rectifier le passé ? « Nos blessures font de nous ce que nous sommes », l’avertit Batman. Eh oui, qui sait quel ouragan multiversel le battement d’ailes d’un papillon pourrait déclencher ?

Warner Bros, l’histoire d’un échec

The Flash se concentre sur la notion du temps, et l’espoir de corriger les erreurs du passé. Le studio Warner Bros. connaît le sujet ! Lorsque Man of Steel, de Zack Snyder, est sorti sur les écrans en 2013, il était censé poser les jalons d’un univers cinématographique équivalent à celui de Marvel. Presque 10 ans et 14 films plus tard, force est de constater que les films de Warner Bros. ont rarement été aussi populaires et réussis que ceux de Marvel.

Que s’est-il passé ? Le studio a été impatient, c’est peut-être là sa plus grande erreur. Après Man of Steel, il a déjà sorti Batman v. Superman, le premier crossover entre deux superhéros emblématiques. Et peu de temps après, Justice League montrait toute la panoplie de superhéros et superhéroïnes DC dans un seul film. C’était trop, même pour un film de 2 heures, car la moitié d’entre eux sont encore relativement inconnus.

Sur ce coup-là, Marvel a été plus malin. Il a raconté patiemment l’histoire des différents héros avant de les laisser s’affronter dans des batailles à grande échelle. DC a fait l’inverse. Il a d’abord présenté l’équipe de superhéros, avant de raconter leurs parcours individuels dans Wonder Woman ou Aquaman, par exemple, des œuvres tout à fait correctes, ceci dit. Le studio semblait avoir appris de ses erreurs, mais visiblement, ce n’est pas le cas. Warner Bros. n’a pas su réaliser de véritables succès avec son univers étendu. Au moins, Suicide Squad et Wonder Woman 1984 nous ont bien divertis ! Black Adam semblait être le coup de grâce.

  • Critique

    « Black Adam » ? Rien de mémorable

    par Luca Fontana

Vu la situation, j’avais peu d’attentes envers The Flash. Les bandes-annonces survoltées semblaient confirmer mes craintes : le studio se contente de balancer aux fans le contenu des archives de DC Comics, pour voir ce qui prendra.

J’ai vu juste, c’est exactement ce qui se passe pendant la majeure partie des 144 minutes du film. Mais ce qui m’a surpris, c’est la quantité d’éléments que j’ai retenus, à commencer par les deux versions de Batman, celui de Ben Affleck et celui des films de Tim Burton, joué par l’incomparable Michael Keaton, qui plus est ! Le Batman des années 1989 et 1992 que tout le monde voudrait retrouver !

Tout le monde, je vous assure.

Un film qui fait du fan service ? Je suis un fan, moi aussi !

Je ne vais pas me priver ! Quand il s’agit de Michael Keaton, The Flash en fait des tonnes niveau nostalgie, et ça marche, car Michael Keaton est toujours aussi phénoménal. Il peut se montrer taquin, mais sa voix grave reste menaçante lorsqu’il fait face à ses adversaires au cœur d’impressionnantes scènes de combats. La célèbre bande-son de Danny Elfman en arrière-plan me donne la pêche. Mon enfant intérieur s’en donne à cœur joie. J’avais parié avec un ami que l’apparition de Keaton se limiterait à un caméo intégré à la bande-annonce pour plus d’effet. Je suis bien content d’avoir perdu mon pari, et je te dois une tournée, Dominik.

L’acteur de 71 ans ne semble pas avoir pris une ride depuis qu’il a porté le fameux costume de chauve-souris en latex de 25 kilos pour la dernière fois, bien au contraire. On le doit sans doute à la magie du cinéma moderne (non, pas au « de-aging », il me semble).

Oui, la version sidekick de Flash a l’air aussi bête qu’ici la plupart du temps.
Oui, la version sidekick de Flash a l’air aussi bête qu’ici la plupart du temps.
Source : Warner Bros / DC Studios

Je suis content qu’on lui ait attribué un rôle moyennement important dans le film. Le Flash d’Ezra Miller a besoin de lui pour faire évoluer son personnage, même si Ben Affleck (le vrai Batman de l’univers étendu de DC Comics) aurait tout aussi bien pu jouer ce rôle. Les réalisateurs justifient leur choix par le fait que Barry fait un voyage dans le temps à travers le multivers. En effet, ses actions modifient tellement le passé et le futur que même de nouveaux personnages se retrouvent avec de vieux costumes, et pas seulement Batman. Dans une scène, Keaton compare cet effet aux spaghettis qu’il a devant lui : certains spaghettis sont placés en parallèle, d’autres se chevauchent, et d’autres vont dans des sens opposés. Puis il tourne sa fourchette dans son assiette et explique avec son ton caractéristique que la bolognaise ressemble au chaos engendré par les voyages dans le temps.

Qui a besoin d’explications scientifiques quand on a une assiette de spaghetti sous la main ?

Mais ne nous faisons pas d’illusions : la présence de Michael Keaton (et d’autres héros), c’est du fan service à l’état pur. Le studio le sait très bien, Keaton aussi. Même Batman le sait, lorsqu’il se cite lui-même « You wanna get nuts ? Let’s get nuts ! » en faisant un clin d’œil à la caméra. Certains trouvent que le fan service est une tactique cheap pour marquer des points sans les avoir mérités. Ils reprochent ensuite aux créateurs de s’attribuer les mérites des autres. Pour moi, c’est plutôt une manière de récompenser la fidélité des fans des comics et des films, qui sont ravis de repérer ces petits (et gros) clins d’œil. Après tout, je suis un fan. Je veux être servi ! Je joue donc le jeu, et je suis prêt à m’acheter un billet de cinéma, pour autant qu’il y ait aussi une bonne histoire à la clef, et des personnages auxquels je peux m’identifier.

Un jeune vieux et un vieux jeune Flash, ou quelque chose du genre

C’est sans doute là que réside le grand défi pour la scénariste Christina Hodson, à qui l’on doit Birds of Prey et Bumblebee. En effet, dans les films précédents, Barry a toujours tenu un second rôle plein de répartie, même dans la version épique de quatre heures du Justice League de Zack Snyder. Faire de Barry le personnage principal de son propre film, c’est aussi l’approfondir, changer son énergie, ses habitudes. Oui, il a toujours de la répartie, mais il l’ouvre beaucoup moins. C’est son nouveau sidekick qui s’en charge : une version plus jeune et assez bête de lui-même, dangereusement proche du stéréotype du casse-pieds.

Encore une astuce pour mettre en avant le vieux sidekick du passé...

Sasha Calle fait une apparition trop courte quoique marquante en tant que Supergirl.
Sasha Calle fait une apparition trop courte quoique marquante en tant que Supergirl.
Source : Warner Bros / DC Studios

Mais le scénario de Christina Hodson rend justice à Barry. Ses motivations sont simples, et pourtant pleines d’émotions. En plus, Ezra Miller joue bien. Je ressens les pertes que Barry a subies à la morte de sa mère et à l’emprisonnement injuste de son père. Je commence aussi à comprendre pourquoi il a trouvé en Batman (celui de Ben Affleck) une figure paternelle de substitution, et pourquoi Batman, orphelin, a pris Barry sous son aile. Cette relation me porte à travers les scènes d’action vertigineuses, surtout dans le dernier tiers du film. Sinon, toutes ces scènes d’action n’auraient pas pris, comme dans Black Adam, cité plus haut.

En parlant d’action, c’est aussi grâce au réalisateur Andy Muschietti qu’elle ne se réduit pas à un simple déluge d’images de synthèse. Il avait déjà réussi à équilibrer action et effets spéciaux dans le remake en deux parties de Ça. C’est aussi le cas de The Flash, la plupart du temps. Comme je l’ai déjà mentionné, le dernier tiers est un peu trop intense pour moi, mais cela n’a pas gâché mon impression générale.

Conclusion : un film à voir et à revoir

The Flash n’est pas un film parfait, certes, mais il se défend bien. Les personnages principaux ont juste assez de profondeur pour porter l’histoire joliment racontée, bien qu’étonnamment linéaire. Le reste est soit noyé dans la tempête d’images de synthèse du dernier tiers, soit si rare qu’il est vite oublié.

Sasha Calle fait une apparition trop courte quoique marquante en tant que Supergirl.
Sasha Calle fait une apparition trop courte quoique marquante en tant que Supergirl.
Source : Warner Bros / DC Studios

Je n’ai pas grand-chose à redire des aspects techniques. Andy Muschietti nous guide avec brio à travers les scènes d’action. Il trouve toujours des angles et des mouvements de caméra intéressants, et les effets spéciaux sont bien faits, pour la plupart, ce qui ne va pas de soi. Seul un élément, dès le début du film, est digne du sort réservé à Dwayne Johnson dans Le Roi Scorpion en 2001, mais je ne vous dirai pas lequel. J’aimerais bien savoir comment ça a pu se produire.

Dans le contexte global de l’univers étendu de DC, qui n’en a plus pour très longtemps, The Flash mérite sa place au podium. Je le placerais juste derrière Justice League de Zack Snyder, même si je dois avouer que le Batman de Michael Keaton me fait vraiment très plaisir.


The Flash sortira en salle à partir du 15 juin. Durée : 144 minutes. Interdit aux moins de 12 ans.

Photo d’en-tête : Warner Bros. / DC Studios

]]

Cet article plaît à 34 personne(s)


Ces articles pourraient aussi vous intéresser

  • Critique

    "Gladiator 2" : dans l'ombre du géant

    par Luca Fontana

  • Critique

    « Deadpool & Wolverine » : quelle réussite !

    par Luca Fontana

  • Critique

    « The Batman » est un triomphe, un chef-d’œuvre !

    par Luca Fontana

Commentaire(s)

Avatar