Vapoteuses jetables : un déchet au fort potentiel addictif
Les vapoteuses jetables semblent être désormais sur toutes les lèvres. Personnellement, elles m’ont permis d’arrêter la cigarette. Et pourtant, je pense que le monde serait meilleur sans ces tétines colorées et sucrées.
Je ne me souviens plus de la date exacte où j’ai arrêté de fumer. C’était un jour de février. Si je l’ai oubliée, c’est peut-être parce que la date compte moins que le fait d’avoir enfin réussi à arrêter, après 30 ans de tabagisme. Et ce n’est pas dû à ma volonté de fer. C’est juste que j’ai trouvé un substitut. Je continue à inhaler de la nicotine, que je vapote au lieu de la fumer.
Les vapoteuses jetables m’ont aidé à passer progressivement de la cigarette classique à la cigarette électronique, du moins au début. J’en ai acheté quelques-unes pour voir si cela pouvait m’intéresser. Puis, avec le temps, je suis arrivé à ma première vapoteuse réutilisable avec système de cartouches. Aujourd’hui, je vapote exclusivement avec une cigarette électronique que je remplis moi-même avec des liquides contenant de la nicotine.
Vous vous dites sûrement que je suis bien le dernier à pouvoir diaboliser les vapoteuses jetables, et vous avez raison. Mais je le fais quand même. Retrospectivement, j’aurais facilement pu sauter l’étape des vapoteuses jetables. Enfin, c’est facile à dire après coup. Tout comme il est facile de voir aujourd’hui les inconvénients majeurs de la vapoteuse jetable pour l’homme et l’environnement.
L’opium des jeunes
Lorsque je me trouve devant un étalage de vapoteuses jetables, j’ai l’impression d’être dans un magasin de bonbons. On en trouve de toutes les couleurs, certaines s’allument ou clignotent lorsque l’on tire dessus, et toutes proposent des arômes fruités et sucrés qui font envie comme « pink lemonade », « goyave, kiwi, fruit de la passion » ou encore « smoothie pêche-mangue ». Des personnes plus ou moins connues vantent leurs mérites sur les réseaux sociaux comme Instagram ou TikTok. Vous l’aurez compris, le public cible des vapoteuses jetables est manifestement les jeunes.
Ce n’est pas forcément une bonne nouvelle. En effet, les vapoteuses jetables ne s’adressent pas uniquement aux jeunes adultes, mais aussi à de nombreux mineurs, ce qui est en train de devenir un sérieux problème, comme le site Internet Addiction Suisse s’en inquiétait déjà en 2023. Si une vapoteuse « chocolate strawberry cheesecake » ne donne pas forcément envie de fumer à un homme d’âge mûr comme moi, elle peut inciter une jeune fille de 15 ans qui n’a jamais fumé auparavant à tomber dans la dépendance à la nicotine. Et ça, c’est vraiment très mauvais.
Extrêmement faciles à se procurer
Lorsque j’ai acheté mes premières vapoteuses jetables il y a quelques années, on ne les trouvait qu’en magasin spécialisé. Aujourd’hui, vous pouvez les trouver dans les kiosques et chez les détaillants (et oui, chez nous aussi). Avant de recevoir un blâme de l’Association suisse pour la prévention du tabagisme pour des modèles apparemment contraires à la loi, nous avions encore plus de produits dans notre assortiment. Les ventes de cigarettes électroniques, notamment jetables, ont fait un bond ces dernières années. Il n’est donc pas étonnant que tout le monde veuille sa part du gâteau.
Si, en Suisse, pratiquement tout le monde peut se procurer des cigarettes électroniques n’importe où et n’importe quand, c’est parce qu’il n’existe pas de règles uniformes. Et c’est pareil pour la vente. Selon le droit suisse, les vapoteuses sont aujourd’hui encore considérées comme des objets usuels et relèvent de la loi sur les denrées alimentaires. Il n’existe à ce jour aucune disposition légale relative à la protection des mineurs au niveau fédéral. Mais cela devrait bientôt changer. La nouvelle loi sur les produits du tabac, qui devrait entrer en vigueur mi-2024, assimilera les cigarettes électroniques à des produits du tabac qui ne pourront donc plus être vendues aux moins de 18 ans.
La vente de cigarettes électroniques est d’ailleurs déjà interdite aux mineurs dans 11 cantons, dont toute la Suisse romande. De plus, les représentants de la branche, comme la Swiss Vape Trade Association, s’engagent depuis des années à respecter des règles de vente destinées à protéger la jeunesse. C’est louable, mais cela met également en évidence les problèmes que pose le patchwork légal actuel, avec toutes ses failles en matière de protection des mineurs.
L’élimination correcte
Les cigarettes électroniques sont principalement composées de plastique, mais pas seulement. Elles sont également équipées d’une batterie lithium-ion qui les maintient en marche tant qu’on peut tirer dessus, ce qui complique leur recyclage. Elles ne peuvent donc ni être jetées dans les ordures ménagères, ni avec les déchets plastiques. L’augmentation des incendies dans les centres de collecte, dont l’émission À bon entendeur a récemment fait état, montre bien que cela est souvent mal fait ou ignoré, et pas seulement pour les vapoteuses jetables.
Comme il n’existe à ce jour aucune réglementation officielle en Europe ou en Suisse pour l’élimination des vapoteuses jetables, la Swiss Vape Trade Association recommande de les jeter comme des piles ou de les rapporter dans un magasin membre de l’association. Quant aux vapoteuses réutilisables, elles doivent être jetées avec les déchets électroniques en raison de leurs batteries rechargeables.
Interdire ou pas, telle est la question
34 pays, dont l’Australie, la Grande-Bretagne et la France, ont déjà interdit les vapoteuses jetables ou mis en place des lois adaptées. Cela suit les recommandations de l’Organisation mondiale de la Santé qui, fin 2023, a vivement appelé les gouvernements à agir en matière de cigarettes électroniques. De nombreux pays n’ont aucune réglementation, pas même un âge minimum légal pour l’achat de cigarettes électroniques. Si la nouvelle loi sur les produits du tabac entre bien en vigueur en Suisse en juin prochain, nous aurons au moins fait un pas en avant dans ce domaine.
Une interdiction des vapoteuses jetables dans notre pays semble illusoire au vu de la puissance du lobby, même si c’est précisément ce que demandent certains responsables politiques et médecins. Le Conseil fédéral a lui aussi compris que ces machines posent un problème en termes de potentiel de dépendance et de pollution de l’environnement. Il a toutefois refusé jusqu’à présent de prendre des mesures concrètes en se référant à la nouvelle loi sur les produits du tabac. À noter que le recyclage des cigarettes électroniques est en train d’être amélioré.
Réglementer et contrôler plutôt qu’interdire
En tant qu’ancien fumeur toujours accro à la nicotine, j’apprécie la cigarette électronique. Cela ne change rien au fait que je considère les vapoteuses jetables comme une épidémie dont nous pourrions nous passer. Mais comme on dit, « avec des si, on referait le monde ». Ces petites choses sont bien parties pour rester et elles s’intègrent à merveille dans notre société du tout jetable que nous sommes toujours, malgré les aspirations contraires. Les interdire ne résoudrait le problème qu’en apparence et en créerait de nouveaux, par exemple un marché noir. Rappelez-vous de la prohibition aux États-Unis...
Au lieu d’une interdiction, il faut des règles claires pour l’achat, la vente et le commerce des cigarettes électroniques, et en particulier des vapoteuses jetables. Ces règles doivent aller au-delà de la loi qui entrera bientôt en vigueur, faire l’objet de contrôles plus stricts des autorités et permettre aux citoyens responsables de consommer de la nicotine en se passant du tabac. Et pour cela, pas besoin que les vapoteuses soient jetables !
Je suis un papa et un mari pur-sang, un nerd et un éleveur de poulets à temps partiel, un dompteur de chats et un amoureux des animaux. J'aimerais tout savoir, mais je ne sais rien. Je sais encore moins de choses, mais j'en apprends tous les jours. Ce qui me plaît, c'est le maniement des mots, parlés et écrits. Et c'est ce que je peux démontrer ici.