Remakes, remastérisations et cie : bonne idée ou arnaque ?
Les remakes et remastérisations permettent de faire renaître certains jeux vidéo du passé. Mais entre réédition de qualité et simple recherche d’argent, l’exercice est parfois bien compliqué.
Les remakes et versions remastérisées d’anciens jeux sont plus populaires que jamais. Rien qu’en septembre 2024, plus d’une douzaine de rééditions de jeux célèbres sont sorties :
- Age of Mythology: Retold ;
- Ace Attorney Investigations Collection ;
- Sunsoft is Back! Retro Game Selection ;
- MARVEL vs. CAPCOM Fighting Collection: Arcade Classics ;
- Lollipop Chainsaw RePOP ;
- Les Chevaliers de Baphomet : L’ombre des Templiers Reforged ;
- Dead Rising Deluxe Remaster ;
- Disney Epic Mickey: Rebrushed ;
- Worms Armageddon: Anniversary Edition ;
- Night Slashers: Remake. Et la pratique semble se poursuivre. Il y a quelques jours, Sony a présenté Horizon Zero Dawn Remastered et Legacy of Kain Soul Reaver 1 & 2 Remastered, qui sortiront respectivement en octobre et en décembre.
Cette vague sans fin déclenche régulièrement des discussions enflammées pour savoir quels jeux sont de bonnes rééditions et lesquels sont de simples arnaques.
Plus d’accessibilité grâce à la modernisation
Pour ce qui est des jeux vidéo, on ne peut vraiment pas dire que « c’était mieux avant ». Ce jeune média a vécu de considérables améliorations au cours des dernières décennies, à la fois sur le plan de la technologie et de la convivialité. Le secteur a su écouter les joueurs et joueuses qui se plaignaient de commandes maladroites ou d’interfaces utilisateur enchevêtrées pour apporter les améliorations nécessaires aux jeux.
Et ce sont justement ces améliorations qui permettent de remettre au goût du jour des jeux comme Age of Mythology Retold et de prouver qu’avec quelques adaptations, les vieux classiques se défendent encore très bien. Aujourd’hui, ces mises à niveau répondent à une véritable demande : à elle seule, la bande-annonce d’Age of Mythology Retold a recueilli de nombreux commentaires enthousiastes et plus d’un million de vues.
Les développeurs et développeuses ont consacré du temps à l’interface utilisateur et à l’équilibrage et donné un coup de jeune au jeu en modifiant les coûts des unités, en créant une nouvelle ère et un menu de priorité pour l’extraction des ressources. Pour en savoir plus, vous pouvez lire l’article de mon collègue Samuel qui a testé le jeu. Il a apprécié la nostalgie sans être gêné par les défauts de l’original.
Dans un autre genre, le remake de Resident Evil 2 a lui aussi réussi à faire entrer ce classique du « survival horror » dans l’ère moderne. Les commandes du tank et les angles de caméra fixes ont été remplacés par une commande à la troisième personne moderne avec une caméra libre.
Ça fait toujours plaisir de voir des remakes élargir l’expérience de jeu originale. Par exemple, dans le remake de MediEvil pour PS4, on peut collecter de nouveaux objets sous forme d’âmes perdues dans le déroulement classique du jeu. Si vous arrivez à tous les trouver et à finir le jeu, vous débloquerez le jeu original sur PS1. C’est le genre de récompense que j’aime voir dans les remakes. Cela me permet de profiter du jeu original sur une nouvelle console.
Utiliser les remakes comme moyen de conservation
Contrairement aux films et aux livres, il n’existe pas encore de moyen standardisé de préserver les jeux vidéo. Une étude de la Video Game History Foundation datant de 2023 a révélé qu’aux États-Unis, seuls 13 % de tous les jeux vidéo jamais sortis sont disponibles gratuitement. Un chiffre très bas que les remakes permettent de contrer. Les jeux pour consoles sont liés à un matériel spécifique et profitent particulièrement des rééditions.
Avant mai 2024, on ne pouvait par exemple jouer à [Paper Mario : La Porte Millénaire](/page/paper-mario-die-legende-vom-aeonentor-im-test-humorvoll-huebsch-und-herrlich-durchgeknallt-33035) que sur Nintendo GameCube, et le jeu original se négociait pour la coquette somme de 200 à 300 francs suisses. Mon porte-monnaie et moi sommes donc reconnaissants à Nintendo d’avoir fait sortir le plus populaire des Paper Mario sur sa dernière console à un prix relativement raisonnable.
Parfois, les remakes permettent aussi de redonner vie à des franchises vieillissantes. Je suis convaincue que c’est grâce au remake réussi de Trials of Mana et de Collection of Mana que nous avons eu droit à un nouvel épisode de cette série autrefois poussiéreuse avec [Visions of Mana](/page/visions-of-mana-ist-das-bislang-schoenste-spiel-der-reihe-34433), même si ce dernier n’a pas vraiment su se détacher de l’héritage de la franchise pour apporter de l’innovation. La réédition du jeu de zombies Dead Rising Deluxe Remaster devrait également servir à déterminer si un nouveau volet pourrait être bien accueilli.
Quand l’argent est l’unique motivation
Bien qu’il existe de nombreux beaux exemples dont les nostalgiques ne sont pas les seuls à profiter, certains remakes ont aussi leur part d’ombre. Dans un business de plusieurs milliards de dollars, derrière lequel se trouvent des actionnaires aux intérêts financiers, les souhaits des joueurs et joueuses passent parfois au second plan.
Il y a près de 3 ans sortait la remastérisation Grand Theft Auto: The Trilogy – The Definitive Edition, comprenant Grand Theft Auto III, Grand Theft Auto: Vice City et Grand Theft Auto: San Andreas. Les jeux étaient par endroits plus laids que les originaux et bourrés de bugs. Sans compter que le développeur Rockstar avait retiré les jeux originaux des stores, ce qui avait profondément choqué les joueurs et joueuses. Face au torrent de critiques, Rockstar a finalement retiré sa remastérisation ratée du marché pour corriger ses bugs. Depuis, la version standard de la trilogie est à nouveau disponible. Les mauvaises évaluations restent un rappel de ce qui arrive lorsque les studios agissent pour l’appât du gain.
Autre exemple à ne pas suivre, Silent Hill HD Collection qui a relancé les deuxième et troisième volets de la série Silent Hill près de 10 ans après leur sortie initiale. Une entreprise qui a suscité des avis mitigés. Les nouveautés, comme le changement des comédiens de doublage, n’ont pas été appréciées de tous. De plus, la technique était moins bonne que celle des originaux et provoquait souvent des bugs.
Mais Konami et Rockstar sont loin d’être des exceptions et les mauvaises rééditions sont légion. Récemment, Lollipop Chainsaw RePOP a recueilli des avis mitigés. Si le grain de folie de l’original est bien présent, certaines chansons d’ambiance ont disparu et les joueurs et joueuses ont dû s’habituer à un gameplay dépassé.
Lollipop Chainsaw étant sorti il y a 12 ans sur PS3 et Xbox 360, un portage sur des plateformes plus modernes était justifié. Ce n’est pas le cas pour The Last of Us. Si le remake The Last of Us Part I avait déjà fait froncer quelques sourcils quant à sa nécessité, la sortie de The Last of Us Part II: Remastered était des plus douteuses. 4 ans seulement après la sortie du deuxième volet, Sony a demandé aux propriétaires de PS5 de payer le même prix que pour l’original, avec des graphismes de qualité similaire. Mon collègue Domagoj a testé cette version remastérisée et pense qu’elle en vaut la peine. Non pas pour ses améliorations graphiques, mais plutôt pour le nouveau mode rogue-like. L’ajout est judicieux, mais il aurait très bien pu sortir sous forme de DLC.
Présenté récemment, Horizon Zero Dawn Remastered ne semble pas proposer de contenu supplémentaire. L’avenir nous dira si les améliorations cosmétiques et les dialogues réenregistrés justifient cette réédition. Le jeu a tout juste 7 ans et se joue sans problème sur PS5.
L’offre gargantuesque prête à confusion et n’apporte guère d’innovation
Les remakes sortis en septembre mentionnés plus haut ne sont que la partie émergée de l’iceberg. Combinés aux sorties régulières de jeux, ils saturent encore plus le marché. D’où le « problème » de devoir choisir parmi une sélection de plus en plus large, dont la qualité varie fortement d’un titre à l’autre. De plus, les rééditions sont rarement innovantes, en particulier dans les studios AAA, comme c’est le cas lorsqu’elles s’inspirent d’un ancien jeu. Les investisseurs n’aiment pas prendre de risques. Même si je souhaite que la qualité des remakes de Resident Evil serve de modèle aux autres rééditions, je sais que c’est parfois impossible pour des raisons financières.
Conclusion : une belle tradition qui a ses défauts
Si le manque d’originalité et les motivations financières évidentes donnent une mauvaise image aux remakes et remastérisations, je ne les trouve pas fondamentalement mauvais pour autant. En tant que fervente défenseure de la conservation des jeux vidéo, je trouve ça super que les jeux soient disponibles pour un public aussi large que possible.
Les remakes conviennent également au média unique qu’est le jeu vidéo. Avec un matériel qui change tous les 2 ans et qui rend les consoles vite obsolètes, il existe peu d’alternatives légales pour jouer à d’anciens jeux. Je sais donc aussi apprécier les remakes qui m’ont déçue, comme Pac Man World Re Pac. Pour revivre ce souvenir de ma jeunesse, je n’ai pas eu besoin de me lancer dans une odyssée pour trouver un jeu PS1 en bon état à un prix supportable. Ce remake m’a permis de profiter de cet instant de nostalgie confortablement depuis ma Switch.
Et c’est précisément l’accessibilité et la nostalgie qui font la grande force des rééditions. Tant que l’intérêt financier n’est pas la seule motivation, le résultat est souvent réussi. Mais sur un marché déjà saturé, il est indispensable d’avoir un regard critique avant d’acheter, en particulier quand il s’agit de remastérisations et remakes. Photo d’en-tête : Warner Bros. Games
J'ai rédigé mon premier texte sur les jeux vidéo à l'âge de huit ans. Je n'ai plus pu m'arrêter depuis. Mon amour pour Husbando 2D, Monster, mes chats et le sport complètent ma passion.